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Constantin Frosin, Au
hasard de mes lectures, Bucarest, Editions eLiteratura, 2014, 522 p
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Ce livre rentre parfaitement dans la connotation de cette revue – à lire mon
éditorial. C’est un texte à la vision large, européenne, en dialogue,
tolérante – la culture doit être tolérante par essence.
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Constantin Frosin se confirme un prince de la francophilie et de la
francophonie.
Le voilà donc devenir un maçon infatigable d’Europe, de culture – la
vraie –, de savoir(s). Il rayonne la valeur de la parole française, le
cœur d’une langue qui se dit – et qui l’est – porteuse de démocratie, de
droit et d’ouverture.
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Ici le chemin est celui d’un pèlerin du Moyen Âge. Constantin Frosin va vers
l’or du français, une étoile qui est sa foi et son point de référence. Il
ouvre des chemins et il en construit, il crée des liens entre France et
Roumanie, Europe, Roumanie, France et monde.
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C’est comme si l’histoire était claire et clarificatrice, malgré tout, sur
une table idéale, des origines à nos jours, pour nous dire et redire que
notre Continent est la terre d’une culture millénaire sous le signe de la
parole et du texte, du message de la littérature – la poésie, en notre cas
spécifique –, de la traduction des idées, vers l’Europe nouvelle qui est en
train de se construire.
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Il faudrait que la France nomme des ambassadeurs de la francophonie dans le
monde, à titre honorifique, comme il arrive pour les consuls. Constantin
Frosin le serait de droitpour son pays.
Il ne fait que chercher les lignes secrètes du dialogue et de l’amitié. Il
fait de la littérature le lieu de la vie en contact, la zone d’accueil, de
la colombe, de l’olivier, des anges et des couleurs, du mal à guérir et de
la joie, de la migration – quel sujet de grande actualité ! –, de l’infini
et de la paix.
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La littérature se refait vie, dans notre cœur et dans la réalité. Une
littérature qui se vit, qui est en nous, et qui nous trace le chemin à
suivre. C’est de là que part la façon de lire de Constantin Frosin, de cette
ouverture qui donne au mot le sens du don, de la figuration transfigurée, de
l’être et de la morale juste. La littérature enlève son masque et se
donne comme une fille de la pureté. L’exégèse est un acte d’amour, un
journal de l’être qui est toujours un poète, en transe poétique.
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La littérature, nous communique Constantin Frosin, est un brassage
d’identités, une communication ancestrale qu’aucune folie ne pourra
détruire. De Dante Alighieri à Emil Cioran, de Guillaume Apollinaire à
Marthe Bibesco, on suit le chemin du brassage, vers ce point mystérieux qui
est notre vie.
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Le Verbe du commencent est allée très loin. Ses fruits sont un livre
d’or, de textes et d’êtres, que nous avons le devoir – et le plaisir,
d’après Roland Barthes – de suivre, le regard pointé au soleil.
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Giovanni Dotoli
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Université de Bari Aldo Moro
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Constantin Frosin, Au fil
de mes idées. Autrement sur la traduction, Bucarest, Editions
eLiteratura, 2014, 436 p
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Voilà un livre que l’on devrait connaître, et lire et relire.
Mais notre époque dite de postmodernité, qui devrait être plus moderne que
le moderne lui-même, court et s’envole – vers où ? - sans trop regarder la
vérité de la vérité.
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La question de la traduction est au centre de la réflexion humaine depuis la
nuit des temps, et le fait qu’à notre époque on continue à produire des
théories, des pratiques, des analyses importantes, est la belle confirmation
que la question est loin d’être réglée. Le sera-t-elle un jour ? Je ne le
pense pas, simplement parce que l’acte traductif est au centre de l’homme.
L’être humain naît seul au centre de la communauté. Et il nécessite des
outils pour communiquer, afin d’exercer sa « liberté libre » rimbaldienne,
qui est la nôtre aussi, jour après jour, à chaque moment de notre existence.
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Parler, regarder, réfléchir, intervenir, suivre, passer, croiser, entrevoir,
prononcer même quelques ho ! onomatopéiques est un acte de traduction.
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Transduco ergo sum,
je traduis donc je suis, pour paraphraser René Descartes.
Et en effet, transduceren’est pas loin de penser. Je pense
parce que je traduis, je traduis parce que je pense et je vis. Même ce
compte rendu est un acte traductif.
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Cette petite entrée en forme d’introduction était indispensable, pour
comprendre l’importance de ce livre de Constantin Frosin.
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Mais qui est cet auteur ? J’ai eu la chance de le connaître par le biais
de son magazine « Le Courrier
intenational de la Francophilie », où il a souvent accepté
quelques-uns de mes textes, en critique et en créateur-poète.
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J’ai défini cet intellectuel roumain « le prince de la francophonie ». Je
confirme toto corde cet appellatif. Et je l’élargis. Constantin
Frosin est aussi et surtout le prince de la traduction : d’idées, de textes,
d’histoire, de mondes.
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Il a interprété le sens profond du mot traduction et de ses composantes –
transet dicere, donc par, à travers, en traversant, en lisant, en
allant, en voyageant, en regardant dedans, et dire, prononcer, observer,
réfléchir, discourir, conter, narrer, affabuler… Et Constantin Frosind’exercer
de toute énergie ces actes, en ambassadeur de valeurs et de textes, de
paroles et d’idées.
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Sa vie est celle d’un constructeur de ponts
(le pont est l’une des images de l’acte traductif – pour aller vers il faut
traverser – trans – un ou des ponts –, de transmetteur – trans + mettre,
donner, passer), de cathédrales de mots et de culture.
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Constantin Frosin me rappelle ces bâtisseurs de cathédrales et de châteaux
au Moyen Âge, ou ces Romains infatigables qui ont inventé le pont en forme
d’arc, pour exercer l’acte du trans-ducere.
Dans ducere, il y a aussi dux, personne qui achemine, conduit,
donne des exemples, est un exemple.
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Et voilà donc que Constantin Frosin conduit vers le centre du mot, son
étoile, à côté du voyage de culture de vers à, du texte A au texte B,
de l’être A à l’être B, à l’infini.
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La traduction, se demande Constantin Frosin, est-elle un acte de spécialité
ou de norme ? Les deux, répond-il, en nous indiquant le chemin à parcourir.
Conscient des difficultés de toute théorie – il les connaît toutes, de la
nuit des temps à nos jours –, il la définit simplement – mais c’est une
simplicité fort complexe – « comme une opération de décodage d’un message
parlé ou écrit dans une langue appelée langue de base, et de codification du
même message dans une autre langue, appelée langue-cible, oralement ou par
écrit » (p. 7).
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Donc décodage, d’une base à une cible, et cela dans l’écrit et dans l’oral.
Oui l’oral. C’est capital, pour retrouver le rythme ancestral de la
parole dont parle tout le temps Henri Meschonnic, l’un des phares de
Constantin Frosin. Le traducteur est un producteur-créateur, un auteur à
plein titre, un intermédiaire qui sait effectuer le passage. Constantin
Frosin est lui-même un passeur, de mots et de valeurs. Plus que les
emprunts il pratique les passages, le bilinguisme qui plus que contrastif
est actif, sans le contre, assimilateur et constructeur, comparatiste et
faiseur de dialogue(s).
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Ici on découvre les « fondements et universaux de la traduction » (p. 30 et
suiv.), le rôle essentiel des dictionnaires – on lira des pages
extraordinaires sur ce sujet-là –, la place de la tradition – dans
tradition aussi il y a trans + ducere–, le rôle de la traduction à
notre époque de mondialisation, le texte comme un corpus d’interrogation
continue, et comme un universel de spiritualité.
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À l’unisson avec Emile Cioran, son noble compatriote, Constantin Frosin
conclut enfin que « traduire est plus difficile qu’écrire » (p. 319). Parce
que c’est une écriture autre, majeure, qui est allée du trans au
dicere, et donc à un message universel. Nous comprenons
pourquoi et comment Constantin Frosin a traduit un nombre étonnant de
livres, en accomplissant sa mission d’être l’un des meilleurs traducteurs
dans le cours de l’histoire de son pays.
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Giovanni Dotoli
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Université de Bari Aldo Moro