Avant de parler de poésie :
as-tu entrouvert le Silence
ses lèvres de bohème de clarté
as-tu connu l’abondance
qui ne dit rien et qui donne tout
et les pas doux d’une délivrance
accueillie dans la salle abandonnée
d’une introspection subtile vers les blés
les moissons de ton cœur avalanche
de neige diamantée contemplée par les Cieux
couvrant de sa blancheur les boues collectives, les défaillances du
passé
As-tu laissé entrouverte la porte aux mille roses
où les notes sont vierges et pures : des nouveau-nés
des spectres de phénix de lumière
des histoires sous tes paupières condamnées
des rêves qui se bousculent
comme des arcs bandés de danseuses
jaillissant dans une clairière
et se croisant jusqu’au tournis
merveilleux de l’unité
• • •
Viendrais-tu aux pieds du Silence des méduses
et de l’ange de mer
un étrange carillon
de bleu transparent
dévoilant une poitrine en feu
phosphorescent
des antennes de muse
des ailes en pétales fragiles de lys
Ce Silence qui sur les nuées liquides glisse…
par-delà les écrans
du conditionnement
Viendrais-tu te souvenir des battements innocents
du Silence fœtal
et des longs rubans de montagnes
qu’auraient contemplé les âmes
d’un monde vraiment solaire ?
Les calices sains d’un mystère
de souveraineté oubliée
sur une île de poussière
aux ombres électromagnétiques
• • •
Et plongeant, en dessous de ces mers,
accepterais-tu de découvrir les coraux salutaires
aux oreilles vastes et détaillées de clémence
d’un Silence de profonde union
telle que l’eau
Je ne voudrais déranger le Silence
ses bottes de fusées au ralenti
les lignes de ce vertical et horizontal ami
ni ses rondeurs de douces et crémeuses frénésies
je voudrais le rencontrer par la blanche féerie
du papier qui se laisse glisser dans un songe
et l’offrir en pétales d’un origami
qui contiendrait un lotus de nacre ravi
Donne-moi ta main
ô silence mystique
déchirant la pâleur des voiles
la sublimant jusqu’au calme lacté
où les ecchymoses émotionnelles ont fleuri
jardin de mille merveilles de nuit
où les roses solaires des êtres se bercent
sous la réflexion jamais vulgaire des étoiles
• • •
On a aperçu la Statue de la Poésie
ses cheveux de musique abandonnée
à la majesté d’un soleil invisible
finalement
senti son souffle humecté
d’un pétale qui déteint sur les lèvres d’une âme
à une âme ; quand on a pu embrasser la fraternité
des mélodies argentines enfantées
sous sa flûte de sincérité délivrant
les nénuphars communs de leur amnésie…
Lorsqu’on a senti en son sein transformé
de l’harmonie divine les traces volatiles
qui amènent à la ligne de soi-même
dans une vague de virginité…
à revoir la campagne auréolée
l’œil d’un cheval tel le carrousel d’une caresse
infinie
au creux de l’abîme…
Le corps de l’immensité goûté !
Alors nul désir ne subsiste de replonger
dans le monde
qui ne connaissait l’ivresse de la marge :
là où les mots se partagent
des pains de raisins blancs et d’astres d’anis
là où la résurrection s’assied
et dévoile des pressentiments de sa symphonie
puis galope tel un pur-sang vers l’horizon masqué !
• • •
La place des mots
est dans le dôme de cristal
des mains de l’âme
dans l’œil qui voyage
au sein du cœur
de ses pétales sages
d’offrande en pulsation
Elle s’anime en une femme
de colliers de bourgeons et de pyramides
embellissant la demeure
de cette heure
de l’incarnation
et dans une larme en flamme
d’invocation de bonheur !
qui se grave sur la page éternelle
de toute l’humanité
La place des mots
est dans l’étoile
cueillie par un enfant qui songe
qui n’a pas peur d’être lui-même
et qui change
enfant immense
comme une voyelle
remplissant l’entièreté du ciel
de sa résonance
Lovée dans la gestation
en l’analyse pure de l’âme créatrice
dans la chrysalide du pardon
des chenilles du drame
elle est peinte vive
dans la sensibilité immortelle
du crucifié