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”SOUS le SIGNE du SAGITTAIRE”:  
Gloses en marge de l'édition bilingue roumano- française du livre
”Point non-visé ...mais touché” / ”601 Distiques Paradoxistes” de Florentin SMARANDACHE  
●Édition revue & augmentée,
●Version  française  par  Constanța NIȚĂ
● Éditios AUREO, ORADEA, 2022, 425 pag.
 
Auteur : Constanța  NIȚĂ

 
§     Plus d'une vingtaine d'années se sont écoulées depuis l'édition princeps de ce livre écrit en roumain et publié sur le site électronique de l' Université New Mexico, Gallup Campus, aux États-Unis.
        Depuis 1998. jusqu'à présent, Les Distiques paradoxistes  de Florentin Smarandache ont connu plusieurs hypostases linguistiques qui se sont concrétisées en autant d'éditions, à savoir: les éditions : serbe ( 2000 ), anglaise ( 2006 ), chinoise( 2008 ), russe ( 2010 ), grѐcque ( 2011 ), italienne ( 2011 ) - à ce que nous sachions jusqu'à présent.
    Pour ce qui est de la présente édition,”revue & augmentée”, l'auteur s'est laissé suggestionner par la traductrice, si bien que l'on a procédé à des remaniements de contenu d'où l'on a exclu une vingtaine de distiques, tout en mettant à profit une autre vingtaine  inspirés ou empruntés de ses volumes antérieurs, imprimés au Maroc, en 1984, à savoir: ”Le Sens du Non-Sens” et ”Anti-Chambres  &  Anti- Poésies ou Bizarreries.”.
     À la différence des éditions de ci- dessus, la présente édition ( ayant comme ”langue- cible” le français ), est augmentée d'une quarantaine de pages critiques consacrées à l'auteur, ainsi qu'au Mouvement paradoxiste dont il est considéré le promoteur averti.
    Comme il se devait, le Mouvement paradoxiste créé par Florentin Smarandache aux années 1980 a fait l'objet, en Roumanie et ailleurs, d'une pléthore d'études critiques, aussi fréquentes que passionnées, vouées à inscrire l'auteur et le mouvement dont il est le fondateur dans le patrimoine universel de valeurs.
 
§    D'ailleurs, l'auteur lui-même s'y inscrit grâce à un palmarѐs de recherche et de création impressionnant, qui compte, jusqu'à présent, non moins que 500 livres et mille articles scientifiques - en tant qu'auteur et coauteur, traducteur et cotraducteur, éditeur et coéditeur - tout en étant comparé par ses biographes à un ”polyѐdre”( cf. M. Bencze )  ou  à un vrai ”Renaissance Man”.
       Récemment, en 2022, le mathématicien- poѐte a reçu  une perle de surcroît à sa couronne: le titre de Professeur Émérite de l'Université Américaine.
       Durant les 33 annéés depuis le début de son aventure existentielle au-delà de l'Océan, cet ”Emigrant à l'infini( voir  le titre du volume paru en  1996 ), ce ”Descendant  de  Magellan et  de Christophe Colomb( cf. Janet Nică ), a créé une oeuvre qui se déploie sur une plage trѐs vaste de domaines de recherche et de création - depuis les maths supérieures jusqu' aux ordinnateurs ( intelligence artificielle, la fusion de l'information), depuis la physique ( ~ quantique, ~ des particules ) jusqu' à l' économie ( ~ culturelle, la théorie poly-emporium ), depuis la philosophie ( v. la neutrosophie - une généralisation de la dialectique ) jusqu' à la logique ( v. la logique neutrosophique- une généralisation de la logique fuzzy intuitionniste ) ainsi qu' à la littérature et à l'art.
 
      À vrai dire, pour Florentin Smarandache, la littérature constitue un ”violon d'Ingresavec lequel il  joue sur tous les méridiens / les site du  monde, dans  les  langues dont il se sert pour écrire ou dans lesquelles il a été traduit jusqu'à présent.
     Avec un tel palmarѐs de recherche et de création, le brillant scientifique de l'Université New Mexico pourrait accéder plutôt et sans réserve au titre nobilier renaissant de ”Homo universalis ( titre métaphorique rarissime de nos jours à cause d'une hyper-spécialisation  dans  des  domaines  déterminés  et  restreints) qu' au ”Prix Nobel”-  qui est refusé d'emblée aux mathématiciens grâce à une clause statutaire absurde, discriminatoire, qui les exclut irrémédiablement et sans appel.
 
§    Pour ce qui est de l'iconographie de cette édition, de son côté herméneutique, si la premiѐre couverture représente la signature astrologique de l'auteur  - qui est  né  le 10  décembre 1954 - sous le signe du Sagittaire ( représenté par un centaure tirant à l'arc dont la flѐche vise l'infini ), la quatriѐme couverture abrite effectivement le symbole de  l'infini  - représenté graphiquement  par une spirale, symbole cosmique et initiatique. 
      Celle-ci s'insinue aussi dans l'économie du livre, marquant de son sceau, centaine par centaine, les distiques, car la spirale  symbolise non seulement l'infini, mais également le paradoxe, elle en est sa représentation graphique, ou bien, sa ”mise en abyme” spéculaire. D'ailleurs, le poѐte-Sagittaire est hanté lui-même par l'infini, dans plus d'une dizaine de distiques qui en sont autant de définitions paradoxales. En voici quelques-unes :
     ” La mesure / Du démesuré”  ( =  Transcendent );
     ” S'emparer de / L'immensité” ( =  Idéal  );
     ” Le fini comprend / L'infini”  ( = Analytique );
     ” Une fin / Sans fin” ( =  Non- concluant );
     ” Au-dela  / De  l'au - delà”  ( =  Dans l'extrême lointain );
     ” Il met des limites / À  l'infini” ( =  L'Horizon );
     ” Le grand infini / Petit ” (  = Microcosme  );
     ” Une limite / Illimitée ” ( = La voûte céleste );
     ” Un fini / Infini” ( = Cercle vicieux );
     ” Une mort  / Immortelle” ( = L'Héroïsme );
     ” Ce n'est qu'aprѐs la mort / Qu'il devient immortel”  (= L'Artiste ).
 
        Ce n'est pas par hasard que l'empreinte de la spirale se retrouve aussi sur les diplômes émises par  L'Association Mondiale des Paradoxistes, en tant que sceau de bon augure pour l' élévation spirituelle, pour la mobilité des idées, pour leur progression perpétuelle. À ce sujet, les 15 Anthologies de Littérature parado-xiste - éditées par F. Smarandache depuis 1993 jusqu'à présent -  et qui reflѐtent l'activité créatrice des membres de ce Mouvement d' avant-garde contemporain, en constituent la meilleure preuve (voir le site: http://fs.unm.edu/LiteratureLibrary.htm).
 
       Dans leur ”Dictionnaire des Symboles”, Jean  Chevalier &  Alain Gheerbrant définissent la spirale comme une figure géométrique riche en significations symboliques, comme un ”motif ouvert et optimiste”, en tant que glyphe universel de la temporalité, de la permanence de l'être soumis aux fluctuations du changement” ( cf. vol. 3,  P / Z, p.250 )  C'est un symbole cosmique et initiatique, ”qui exprime l'apparition d'un mouvement circulaire qui se développe à partir d'un point d'origine et se prolunge à l'infini”.  Elle représente, en fait, ”les rythmes répétés de la vie, le caractѐre cyclique de l'évolution, la permanence de l'être confronté à l'éphémétité du mouvement”.  (cf. Chevalier & Gheerbrant, op.cit., p.250)       
      Celle-ci est omniprésente dans la nature - depuis la banale toile d'araignée, les corolles des roses, les cônes de sapin ou les pommes de pin, depuis la double hélice spiralée d'une molécule d'ADN, jusqu'aux galaxies spiralaires - ce qui prouve  l'ubiquité de ce motif  isomorphe.
 
§      Rattaché à la spirale par son sémantisme iconographique, le paradoxe est ”l'un des moyens de maintenir l'esprit heurté entre deux probabilités”- dit Al. Ciorănescu ( in: ”Le Baroque ou la découverte du drame”, Éditions Dacia, Cluj- Napoca, 1980, p.175). 
      Si les spéculations mathématiques inspirées par le symbolisme de la coquille spiralée font que la spirale devienne ”le signe de l'équilibre dans le déséquilibre, de l'ordre de l'être dans le changement du mouvement”(cf.J.Chevalier & A.Gheerbrant, op.cit., p. 251), pareillement, le paradoxe - en tant que stylѐme universellement connu dans tous les arts baroques - se remarque par le soin de réunir en une seule entité conceptuelle deux intentions différentes et parfois contradictoires, tout en exprimant, de la sorte, simultané-ment, deux idées différentes” ( apud Al. Ciorănescu, op.cit., p. 264 ).
       Dans  son ”Dictionnaire  de poétique et  de Rhétorique”,Henri Morier définit le paradoxe en ces termes: ”C'est une opinion contraire à l'opinion commune, une affir-mation qui, au premier abord, paraît choquante ou absurde”- par rapport  à  la logique normale. ”Chaque fois que l'esprit s'endort sur les idées reçues (...) le poѐte, le philosophe et le prophѐte sont là pour le frapper de paradoxes, pour lui prouver que les premiers seront les derniers, que qui gagne sa vie en ce monde, la perd dans l'autre...” ( n.s. )   
    ”Le paradoxe est l'arme de l'esprit militant, qui affirme sa force;  c'est la raison pour laquelle on le trouve aussi bien dans L'Évangile  que dans les pages de Nietzsche” ( p.864 ) Le paradoxe est une alliance de mots antithétiques et qui paraissent, logiquement, incompatibles. La preuve en est même son étymologie grecque: ”paradoxon”signifie:”à  côté ( de ) l'opinion”( cf. Henri Morier, op.cit.)
      Les paradoxes sont ”les monstres de la vérité ” et, surtout, de l'ingénuité” - affirme Baltasar Gracián ( 1601 - 1658 ), le théoricien du Baroque espagnol, dans le Discours XXIII de son ”Agudeza y Arte de Ingenio”/ ”L'Acuité  et  L'Art  de  l'Esprit( 1642 ).
      Ce sont ”des sophismes trѐs sagaces, des maximes pleins de grâce - également subtiles et métaphysiques”- qui supposent ”beaucoup d' attention pour être saisis et d' autant plus pour être conçus”. Pour Baltasar Gracián, le paradoxe c'est ”l'un des plus grands excѐs de la pensée”.
      À trois siѐcles de distance, le fondateur du Mouvement paradoxiste surenchérit les paradoxes en tant que stylѐmes baroques qui violentent la réalité afin de la rendre homogѐne, en usant des effets humoristiques et ironiques issus du jeu de mots, de l'équivoque, de l'oxymore, ainsi que des antithѐses et des calembours, somme toute, d'un ”art combinatoire” (”ars combinatoria” ) qui est consubstantiel au Baroque éternel. 
 
 
BIBLIOGRAPHIE  CRITIQUE  SÉLECTIVE
 
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Sursa: Constanța Niță, 2023